Sunday, August 28, 2005

Plénitude casablancaise...


Je reste là, sans bouger, sans comprendre. Etranger. Dérouté par son sourire aujourd’hui spontané et moderne, teinté d’assurance, mais toujours si fragile, émergé d’une récente genèse. Bouleversantes attitudes, échappées des carcans, affranchies des affres d’un passé qui encore contraint le futur.

La démarche est libre, le pas est dansé. Le tissu vole au vent, fluide et léger. Souplesse d’un corps qui a trouvé l’aire d’envol, parenthèse opportune, ici et maintenant.
Je foule prudemment l’avant scène d’une femme en naissance, en gardant intimement, en silence, l’émotion des secrets de coulisses.


Oubliée la lenteur ancestrale imposée d’un soleil de tropique, le cœur bat comme la vie. Elle jouie au présent d’une volonté tendre et farouche d’existence, guidée sans conscience par le chant des sirènes venu d’un espace aujourd’hui planétaire. Insolente et téméraire, elle captive la vitesse pour remplir son sac de fragments de bonheur, espérant un jour qu’ils fusionnent, créant l’alliage de l’expérience acquise.


Elle porte fière les couleurs d’un ailleurs tout en étant elle même. Que vienne vite ce créateur magique qui saura réconcilier l’identité et le paraître, volant à la nature aux traditions et à l’esprit du rif, la douceur, l’alliance et l’alchimie des couleurs de l’Atlas.

Sans résistance, mon esprit est troublé au constat que sa peau est dorée, des sables les plus rares, des ombrages les plus frais. Je capte furtivement la mélodie musicale du flirt de deux partitions linguistiques, dans une prosodie souriante, soutenue et vibrée. Quel est le ton de sa voix quand elle est attristée ?


Elle ravine les cœurs et fixe les regards. Trapéziste et jongleuse, c’est grâce à sa beauté qu’elle fait frémir les âmes. Les canons ont aujourd’hui ses faveurs et portent avec eux la sécurité réconfortante, que l’horizon, temporaire interdit, fragilise.

Pourquoi après tout vivre une lointaine aventure quand le nid de son être pour l’instant y suffit.
Dans un écrin de soies, cousues de dentelles, nudités opportunes et ludiques, je vois s’échapper au loin ce papillon aujourd’hui, chrysalide d’hier. Citadine, elle accompagne ses ambitions et ses rêves à travers les étroites ruelles blanches et bleus, au pied des remparts restaurés.

Elle plaide sans vergogne le secret d’un jardin de sincérité, de simplicité sans savoir qu’un brillant ne sera jamais si précieux car c’est elle qui en est le diamant. Elle est la richesse présente et future d’une nation, l’essence d’une royauté salvatrice, la fronde d’une nouvelle maternité, l’élégant modèle de la féminité, le témoignage insoupçonné d’un courage exemplaire qui, sans un mot, brave l’extrême exégèse.

Qui saura faire comprendre aux hommes qu’il vaut mieux parler en silence, laisser Dieu au repos, et confier serein le destin à celles qui portent le monde plus qu’elles ne portent les armes.

Fière et digne, sa détermination forgée au fil d’une éducation rigoureuse elle sera désormais l’avocate d’un pays mal connu, combattant les truismes d’ignorants, engagée, militante et discrète. La vérité ne viendra que du charme, le salut de la raison, et l’amour infini.

J’aimerai tant être en altitude du temps, au confluent de deux mondes, abstrait des époques et des modes. Qui m’a enlevé l’échelle qui m’empêche de redescendre du rêve à la vie ?

Le cynisme me quitte, qui empêchait ma souffrance.

Rencontres éparses, Casablanca, dimanche 28 Août 2005

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