Là ou certains, aux rênes de l’hexagone, pilonnent mon optimisme légendaire de leurs turpitudes invraisemblables, inouïes, démagogues et inhumaines, dans une atmosphère d’apathie estivale et d’immobilisme systémique, d’autres me rappellent subrepticement le privilège joyeux – mais pour combien de temps encore - d’une nationalité toujours un soupçon bienveillante.
Cette nationalité qui scintille dans les yeux de ceux et celles que nous croisons quotidiennement au gré de nos déambulations et qui sans doute se remémorent quelques bribes des pages élimées et jaunies des cahiers d’école de leur enfance.
Ces enseignements qui associaient à la France les mots d’une langue que certains n’hésitent pas à nous murmurer avec une humilité touchante ; Qui expliquaient ces architectures dont certains joyaux bordent encore les rues toujours parcourues d’un tramway d’époque merveilleusement chaotique; Qui historiaient les droits universels d’un esprit des lumières dont tant ici voudraient en voir souffler une réalité sereine. Qui peignaient les mets d’une gastronomie dont les enseignes restent gravées en français dans la pierre au fronton des échoppes. Mais qui aussi faisaient la promotion d’une certaine tolérance, d’un humanisme fondateur, d’un talent créatif et pas seulement constitutionnel ou d’un équilibre social, qualités dont pourtant nous avions été si avares à une autre époque quelque peu antérieure.
Alors, dans ce contexte, c’est sans doute un exercice vain que d’aligner quelques lignes sur Alexandrie qui ne soient pas déjà consignées dans un ouvrage fusse t’il un récit historique, un de ces multiples guides ou bien un carnet de voyageur. En effet, ces recueils témoignent tous invariablement des vertus issues des échanges, des qualités communes aux Grands Hommes, des avancées fruits d’épopées historiques.
Tout ce qui fait la grandeur d’un gouvernant, le rayonnement d’une ville, la force d’une nation, la genèse d’un rêve commun, une Histoire.
Vivre en terre du Moyen Orient, à commencer par cette ville grandiose, et pas simplement car fondée par Alexandre le Grand, qui d’antan éclairait le bassin méditerranéen de son phare, merveille du monde et forte symbolique était á l’origine un acte de plaisir. S’immerger dans cette civilisation et y apprendre l’arabe, á l’épicentre du carrefour qui vit grecs, ottomans, croisés, perses, arabes et turcs se succéder et apprendre á vivre ensemble deviendrait presque un acte militant dans un agenda français qui n’est pas le notre.
Si je devais vous orienter d’un conseil pour saisir l’insaisissable ambiance, le roman de l’écrivain Alaa al-Aswani et réalisé au grand écran par Marwan Hamed, intitulé l’immeuble Yacoubian, même si relatant l’époque de Nasser constituerait un assez bon aperçu de l’atmosphère égyptienne que nous vivons depuis quelques jours.
Certes, c’est une réalité un peu différente, un brin surannée parfois tourmentée par une poussée moderniste intrusive et criarde, même si nécessaire et surement irréversible. Mais c’est aussi le creuset d’une vérité cosmopolite et confessionnelle où il semble qu’une tradition n’est jamais disparue : l’accueil de l’étranger. C’est sur cette terre d’accueil, de tolérance et d’Histoire que nous séjournerons, Nicole et moi, pour trois mois et tenterons d’oublier un instant le désopilant spectacle d’une Diva décatie.